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L'oeil en chambre
L'oeil en chambre
  • Le seul ouvrage de technique photo que je possède, porte une dédicace de ma mère : "Noël 1984, pour ouvrir une carrière de photographe". Avec le temps, submergé par les tirages, l'amateur a accueilli avec joie le numérique, Internet et Photoshop.
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3 janvier 2014

Après la photographie

Collection Photo Arte - film 26’ - notes commentées

 

LiWei6

 Lee Wei 29 levels of freedom 2003 Beijing

 

 

Le documentaire s’ouvre sur des photos de Michel Campeau, qui, de 2005 à 2009 est parti à la recherche des dernières chambres noires (dark room) dans lesquelles sont développées les photographies argentiques, afin de documenter un siècle et demi d’inventions, de procédés et d’appareils qui ont accompagné l’évolution de la photographie depuis ses débuts. Suit un extrait vidéo de l’implosion, en 2008, de l’usine Kodak de Chalon sur Saône où l’on fabriquait jusqu’en 2005 des films argentiques.

La disparition de la photographie argentique implique, nous dit la voix off « la fin d’une pratique de la photographie qui mettait l’accent sur le moment de la prise de vue, de la saisie sur le vif, de l’instant décisif. » Le reste était l’affaire du laboratoire qui développait la pellicule et faisait les tirages. « Press the button, we do the rest » disait une publicité de la firme, « Appuyez sur le déclencheur, on s’occupe du reste ». Vrai pour l’immense majorité des photographes amateurs, faux pour les professionnels et les passionnés. Pour eux, la bonne photo a toujours largement résulté du travail fait en chambre noire.

Désormais, plus que la prise de vue, continue la voix de Mathieu Demy, c’est le reste qui est devenu le plus important, « le traitement après coup de l’image que l’informatique permet de manipuler librement pour modifier à loisir les formes, les textures, le cadre, les lumières et les couleurs. » Toute chose qui, soit dit en passant, a été pratiquée dès les débuts de la photographie par les professionnels et les amateurs éclairés. La différence avec le numérique, c’est qu’un nombre bien plus grand de personnes est désormais capable en quelques clics de retoucher le fichier de prise de vue. Toutefois, le sujet de cette indispensable série documentaire « Photo », n’est pas la pratique amateur mais la photo pratiquée par des professionnels, la photo comme 8e art.

 

yves-klein-le-saut-dans-le-vide

 

Yves Klein Le saut dans le vide 1960

 

Vertiges numériques

La photographie argentique est morte, vive la photographie numérique ? Sans doute. Les photographes d’aujourd’hui usent et parfois abusent de cette liberté de traitement des photographies numériques, pour des résultats plus ou moins intéressants, avec une conséquence dont on peut se réjouir : il y a de moins en moins de monde pour croire qu’une photographie est une image fidèle de la réalité.

Ça n’empêche pas un certain nombre de photographes de continuer à jouer avec l’illusion photographique. Ainsi les chutes de Kerry Skarbakka sont des images à la fois « vraies » car c’est bien le photographe qui chute, et « fausses » car entièrement retouchées pour faire disparaître baudriers et sangles qui lui permettent de chuter en toute sécurité. « Le saut dans le vide » d’Yves Klein en 1960 relève de la même démarche d’illusionniste (voir « la photographie conceptuelle » de la même collection). Du coup on peut préférer la série « la chute » de Denis Darzacq où les figurants sont réellement pris en suspension dans l’air sans câbles ni filets.

 

Kerry-Skarbakka-falling-5jpg

 

Kerry Skarbakka Falling

 

Andreas Gursky, est l’un des pionniers de cet illusionnisme numérique qu’il pratique à une toute autre échelle et à d’autres fins. Lui procède à un photomontage de plusieurs prises de vues qu’il retouche jusqu’à obtenir une image  plus parfaite que le réel : avec Pyong Yang I, « il réalise à sa façon les rêves de maîtrise totale du grand ordonnateur de la cérémonie Kim Jung-il qui a mobilisé 80  000 personnes. Comme lui, le photographe numérique peut mettre en scène le monde. »

 

 

Andreas Gursky Pyongyang_I resized

 

Andreas Gursky Pyong Yang I

 

Les paysages naturels et urbains de l’Allemande Beate Gütschow sont eux le produit de montages numériques par lesquels sont ajustés bout à bout dans Photoshop des fragments de photographies prises par elles sans idée préconçue et stockés dans une banque d'image personnelle. Pour les paysages, elle s’est inspirée de traités de peinture de paysage idyllique du XVIIe et XVIIIe siècles. Pour ses paysages urbains, la démarche est identique : Elle a assemblé des morceaux réels d’architecture pour en faire de faux paysages urbains, à la fois « étonnamment proches des désastres d’aujourd’hui » et, à bien y regarder, assez peu vraisemblables.

 

beate-gutschow S#34 - 2009

 

Beate Gütschow S#34 - 2009

 

 

beate-gutschow- LS

 

Beate Gütschow série LS

 

Puisque plus aucune image n’échappe au soupçon de falsification de la réalité, le parti pris de la photographe allemande Loretta Lux est d’en jouer en laissant apparaître l’artifice, en ne cherchant pas à être réaliste. Pour elle aussi, la peinture est la référence.

Les enfants sont pris en photo en studio et insérés dans un décor sans raccord de lumière, sans rajout d’ombre. Dans « The walk », pour accentuer le trouble, les têtes des jumelles sont légèrement agrandies

 

Loretta_Lux_06

 

Loretta Lux Troll 2 2000

 

LorettaLux16

 

Loretta Lux The rose garden 2001

 

Loretta_Lux_05

 

Loretta Lux The Walk 2004

 

Chez le russe Oleg Dou, avec ses séries d’enfants mutants, l’artifice est encore plus affirmé. Au départ de son travail une erreur de manipulation, une application excessive de filtres de retouche dont les photographes de mode se servent pour effacer toute imperfection de la peau de leur modèle. Tel un chirurgien esthétique qui manie son scalpel, il fait disparaître toute trace d'humanité chez ses modèles.

 

 

oleg dou cheburashak 2008

 

Oleg Dou Cheburashak 2008

 

 

 

Photographie « Low Tech » : Du neuf avec de l’ancien

 

« Refusant ces vertiges numériques où toute certitude se dérobe, des photographes ressuscitent des techniques rudimentaires des premiers temps de la photographie où chaque image était difficilement arrachée au réel. »

 

Camera obscura géantes

L’homme connaît le principe de la chambre noire (camera obscura) depuis l’antiquité : un volume clos, une petite ouverture sur une des parois, l’objet éclairé apparaît sur la paroi en face inversé et tête en bas, il suffit d’y placer du papier photosensible pour capter l’image après un long temps de pause.

 

L’allemande Vera Lutter se sert ainsi de containers à l’intérieur desquels elle place côte à côte plusieurs feuilles de papier photosensible et obtient de la sorte directement des négatifs de très grands formats (2.5 m sur 5.7 m). L’image est captée sans objectif et donc sans déformation. Le temps de pause est long et, comme dans le Paris d’Atget, l’image est donc désertée par les hommes.

 

vera lutter rheinbraun 21-22 août 2006

Vera Lutter Rheinbraun 21-22 août 2006 (254 x 569 cm)

 

 

 

L’américain Abelardo Morell transforme lui une chambre d’hôtel en chambre noire mais sa signature est de photographier non seulement l’extérieur mais aussi la pièce, murs et meubles. Quant au hongrois Gabor Ösz, il utilise lui aussi l'architecture comme sténopé mais son « truc », c’est l’image prise par plusieurs ouvertures (les trous laissés par des vis par exemple).

 

abelardo morell camera20_Bostons-Custom-House

 

Abelardo Morell CO Bostons Old Custom House in Hotel Room 99

 

 

 

Photogrammes

Les photogrammes d’Adam Fuss relèvent de la même démarche de retour aux sources de la photographie, avec bien sûr le sel nécessaire d’une idée nouvelle, ici la robe a été remplie de serpents vivants.

 

 

adam fuss méduse

 Adam Fuss La méduse 2010

 

Lomographie

Le succès du mouvement Lomo remet l’accent sur le moment de la prise de vue, comme geste instinctif et brut, l’accident et le défaut assumés, en réaction à la perfection glacée des images numériques (flou, décadrage, couleurs saturées), le ratage technique érigé en programme. Néanmoins, si un nom de photographe est cité, les quelques clichés visibles sur Internet confirment qu’on a affaire à un mouvement d’amateurs et non de professionnels.

 

Art plus "conceptuel"

 

Les Panoramas de surveillance de Jules Spinatsch

Dispositif de prise de vue : durant 3 heures, une image prise toutes les 4 secondes par 4 caméras d’un espace. L’artiste reconstruit avec ce matériau une image qui a la propriété unique de donner une représentation d’un seul espace mais en mélangeant les temps.

 

jules_spinatsch_disontinouspanorama davos

 

Jules Spinatsch Discontinous Panorama (ici à Davos)

 

 

 

Les Googlegrams de Joan Fontcuberta

Chaque image est une mosaïque composée d’images collectées sur requête ayant ou non un rapport avec cette image, et assemblées grâce à un logiciel de photomosaïque

 

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 Joan Fontcuberta googlegram-9-11 NY

 

 

 

 

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